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Extrait: L' éloge de l'encre.


Extrait. Préceptes d’un horishi. L’éloge de l’encre. Seikichi.

Atelier Do No Eko


Maître Seikichi,...lorsque j’ai terminé mes corvées, la préparation de l’atelier, des aiguilles et des encres, mes dessins et en fin de journée le nettoyage de l’atelier,…et bien je lis un peu de philosophie.

- La philosophie peut manquer de sincérité Kuroi. Elle prendrait au mieux la forme du turban de Benzaiten (*), en ce sens qu’elle met en relief paradoxes et mystères. L’esprit peut être séduit par la course qu’offre ce ruban, un peu comme dans ces manèges étranges d'aujourd'hui,…comment appelles-tu ça Kuroi?

- Les montagnes russes sensei.

- Oui c’est bien ça,…les montagnes russes. Quelle torture!...enfin,... en réalité Kuroi, ne revient-on pas à notre point de départ lorsque l’on choisit cette voie?

- Mais tous ces penseurs alors,…

- Tous ces penseurs donnent des noms, des théorèmes, une causalité à leurs propres ombres. Ils savent néanmoins que la réalité même qui définit ces ombres et la lumière source est bien en dehors de leur compréhension. Les philosophes savent cela depuis le début de la philosophie. Et pourtant ils continuent leur course. A croire que le manège est divertissant!

- Oui je comprends maître,…toutes ces idées sont fausses alors?

- Je sens ta déception, je la comprends aussi. Toutes ces idées s’épanouissent par le biais du langage. Le langage est une illusion. En nommant quelque chose on réduit ce quelque chose voir même on déforme ou perverti ce quelque chose. On fini par croire que le nom que l’on a choisi pour ce quelque chose est plus réel que ce qu’il est par lui-même.

- Je ne suis pas sûr de comprendre Seikichi sensei.

- Tu te nommes Kuroi n’est-ce pas?

- Oui c’est le nom de deshi-apprenti que vous avez choisi pour moi.

- Or ton existence ne peut se réduire à ce qualifiant.

- ?

- L’homme d’un point de vue biologique, scientifique, philosophique ne sait pas ce qu’est l’humanité. Donc l’homme ne peut pas expliquer ton existence. Tu vois le nom que j’ai choisi est bien réducteur après tout.

- Oui je comprends. Mais c’est quand même difficile de se dire que le langage n'est qu'illusion.

- Le langage est une usine qui fabrique de la réalité. Cette réalité est au service de la survie. Tout groupe d’hommes possède son propre langage et donc sa propre réalité. Et cela toujours au service de la survie. Combien de Dieux l’homme a t-il engendrés depuis qu’il existe? Penses-tu que nous pourrions avancer un chiffre?

- Non, j’imagine que non.

- Et la réalité, les croyances des cannibales de la Nouvelle Guinée valent-elles moins que la réalité et les croyances des Olmèques, des Chrétiens ou des hommes d’affaires de Wall-Street? Car tous sont des hommes et des femmes, exactement comme toi et moi, avec des peines et des joies. Avec la volonté de survivre.

- Mais la conscience alors?

- Ecoute Kuroi, la conscience ne vaut pas plus, à échelle cosmique, que les ocelles d’un papillon. C’est certes cette particularité de l’homme qui lui a permis de dominer et soumettre les autres espèces à sa volonté. Mais rien de plus, elle n’est pas le lieu privilégié et unique abritant la particule du divin.

- Je dois alors accepter de n’être rien.

- Oui, mais pas le « rien » à l’intérieur d’un langage, donc d’une société et par conséquent d’une réalité. Le « rien » du Mushin.

- Je comprends sensei!

- Bien.

- Sensei,…comment vous percevez-vous?

- Je me vois comme un chien, un porc, une fourmi, un crapaud. Je refuse mon statut d’humain. L’univers est un mystère et nous faisons partie intégrante de ce qu’il est. Les animaux ont pour eux d’être cohérents avec cette réalité non nommée. Les animaux n’ont pas pollué leur existence avec le langage. Ils ne sont pas pervertis. Leur réalité est celle de l’univers. Je suis un homme qui appris à rejeter le langage, qui a appris a redevenir animal.

- Mais cela ne nous rendrait-il pas sauvages, ou violents?

- J’ai entendu dire que les astrophysiciens pensent aujourd’hui que les galaxies entrent en collision. Dit comme ça ce phénomène pourrait sembler violent mais en réalité il ne l'est pas. La violence n’est pas une mauvaise chose lorsque qu’elle est en accord avec la nature et son état. Après tout, notre artisanat, le tatouage traditionnel, n’est-il pas violent? Ne troquons nous pas l’encre contre le sang? Et pourtant, tout comme les ocelles des papillons et la collision des galaxies, l'Irezumi n'ignore pas la beauté.

Kuroi, prends le temps de faire quelques tours de ruban. Mais n’oublie pas qu'un jour tu seras horishi. Le propos du horishi est l’Irezumi. Rien de plus et rien de moins.


(*) Comprendre une figure de type ruban de Moëbius.


Tohibiki & Shakki, tatouage japonais à Paris.


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Tous droits réservés. Toute copie, représentation ou reproduction intégrale ou partielle, sans l’autorisation de l’auteur, par quelque procédé que ce soit est illicite et interdite. Articles L.335 et suivants, du Code de la propriété intellectuelle.​


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